« TRANSFORMOLOGY »  - (Une théorie sur la valeur du vecu).
Martín Wolf-Felder

En souvenir de Michel Boulet et Anne Levallois

La vie psychanalytique actuelle est confrontée à la tâche de récupérer la base biologique qui l’a rendue possible. Nous faisons référence au Erlebnis (vécu) de la naissance, en tant qu’impression informative du génome.
Parce que l’événement de la naissance, qui précède celui de désirer, supposerait un con-centrer de l’excitation somatique qui permettrait l’apparition d’un dé-centrer immédiat dans ce sujet-objet néonatal, qui auto-estime-rait la valeur du vécu animique de sa circonstance de besoin somatique comme « incitation » ou « danger ».

L’instance de concentration primordiale agirait comme déclencheur de l’origine même du vécu animique dérivé de la pression qu’exerce le besoin, à partir de la contrainte catabolique « osmotique » engendrée entre la vie de chaque cellule et la vie de chaque espace intercellulaire. En qualifiant cette contrainte catabolique comme « osmotique », nous voulons reprendre le terme qu’utilise Guattari (chaosmose) pour désigner ce que Deleuze appelle « événement » et ce qui est aussi « événement » chez Prigogine.

Lacan, sans théoriser le vécu, a lu Deleuze en 1967, mais curieusement, pas encore Prigogine, qu’il ne mentionnera pas, non plus, dix ans plus tard, lorsque le mathématicien obtient le prix Nobel de chimie et son concept d’ « événement » devient public.

C’est par la théorie du « chaos » que Prigogine fait la critique du structuralisme de Lacan. D’après Prigogine, le chercheur qui « manipule » la nature pour faire de la science, doit adopter une attitude « d’écoute poétique ». Le terme « écoute » nous fait évoquer Freud et cette sorte d’attention « également flottante » appliquée au « maniement » des aspects complexes de la nature de l’information verbale humaine. Cette attention dont la « valeur » est également flottante renverrait à son tour, à cette hypothèse de Freud, d’après laquelle le nouveau-né « évalue » (auto-estime) (wertet) son vécu comme un « danger ».

C’est que la naissance humaine est pour Prigogine, l’exemple d’un « événement » qui entraîne une transformation totale. Au moment de la naissance de milliards de micro formes somatiques de souffrir sont « centrées » et engendrent, simultanément, du fait des valeurs circonstancielles de O2 et de CO2 dans le sang circulant, une forme première et unique de « valeur vitale ». C’est une forme primordiale « d’ex-citation » du « besoin somatique » qui devient « in-citation animique » ou « danger » et puis valeur équivalente à sa « forme opposée », c’est-à-dire, valeur de « satisfaction animique » en tant que vécu : vécu de « salut » pour Ortega y Gasset, vécu de « valeur vitale » pour la biologie.

Deleuze placé en dehors de la psychanalyse, d’après Lacan, parle de la psychanalyse comme science de l’événement par rapport au « processus animique primaire », alors que Lacan préfère lire ce processus comme limité à la psychose chez Freud.
La pratique analytique est surtout liée à des formes du langage et très peu à des valeurs du vécu, mais ce n’est pas pour autant que ces formes n’expriment pas de valeur. Parce qu’en psychanalyse, aussi bien les rapports à l’intérieur de la paire pratique-théorie que ceux de la paire forme-valeur ne sont ni linéaires ni simples. L’épistémologie et la méthode demandent que le devenir dialectique de la paire « forme-valeur » soit théorisé à partir de la dialectique : quantité - qualité (Hegel), formes de la valeur (Marx), relativité dimensionnelle du figuratif (Freud) ou relativité dans la théorie einsteinienne.
Si on n’établit pas un rapport entre la forme et la valeur, il n’y aura pas non plus, de rapport établi entre la pratique d’écoute de la forme et la théorie de la valeur du vécu. En tel cas, la conception matérielle de la « valeur » du « vécu » primordial ne serait pas clairement définie comme ex-pression d’un centrer somatique générateur de la vie animique proprement dite, par im-pression de la pression vitale de charge de CO2 (anhydride carbonique, bioxyde ou dioxyde de carbone), qui est l’expression du manque de O2.
Parce qu’une véritable trans-forma-tion a lieu dans l’événement de la naissance. Elle opère par la synthèse d’une in-forma-tion multiple qui se réplique sur le vécu. C’est une trans-forma-tion en valeur, le résultat de la somme des valeurs d’un nombre infini de micro forme-s d’in-forme-r. Cette macro in-forma-tion arrive et produit un changement total parce qu’elle condense, concentre ou centre la valeur. Ce serait la « valeur de vivre », comme proposition, qui centrerait ainsi un sujet-objet qui vit, auto-estime, im-prime et ex-prime.

Au cours de la deuxième guerre mondiale, Norbert Wiener commence à s’intéresser au « contrôle » et à la « communication » en rapport avec la défense logistique. Il a besoin de calculer le tir d’un missile pour atteindre une cible mobile dont le pilote a déjà tenté des actions pour éviter un tir précédent. Wiener tient compte de Heisenberg et de son principe de l’incertitude, mais pas suffisamment de Freud et de son principe du transfert qui est identique et qui précède aussi bien le principe de Heisenberg que la physique quantique. Ce détail serait le résultat du corporatisme présent dans le domaine de la recherche scientifique où le même concept se réplique ou est figuré, de façons diverses, par des synonymes adaptés à l’univers de la langue propre à chaque science. Le sapiens oublie qu’il est un animal informé par l’information d’une planète –la sienne-, appartenante à un système solaire animé. D’après Freud et Ortega y Gasset, sa soif de savoir serait orientée par son besoin d’éviter la répétition du danger vital néonatal et de retrouver ainsi le salut. Nous désirons croire, créer, être le centre parce qu’étant nouveaux-nés, pour continuer à vivre nous avons eu besoin d’être le centre animique du soma et le centre d’attraction de valeurs d’attention.

Etre un centre d’attention pour pouvoir continuer en vie, en attirant l’attention d’un autre individu (auxiliateur), serait stipulé ou « in-formé » par le génome depuis notre « forme » pseudo-prématurée de naître. Le « pouvoir vivre » à partir de la naissance même serait en fait, ce que nous avons l’habitude d’appeler «  pouvoir » (42) ; un pouvoir complémentaire, que les faits biologiques définissent comme « vital » et « transféré », en ce sens qu’il est toujours conféré par l’autre, parce que c’est ainsi inscrit sur leurs génomes respectifs : le Sujet-objet-reclamâtor-reclamâtrix émet-appelle ou attire et le Sujet-objet-reclamâtor-reclamâtrix reçoit-répond. Un objet non sujet reçoit l’attribut d’attirer lorsque le sujet-objet lui transfère l’objectal. C’est la même chose que l’analyste transfère à l’analysant dans la théorie de Freud et que le sujet transfère à l’objet en l’éclairant pour l’observer dans la théorie de Heisenberg, trente ans plus tard. Mais avant le transfert animique qu’un sujet-objet reçoit ou donne, le soma lui avait déjà transféré l’animation qui le transforma en vécu initial de sujet-objet. Le sujet-objet naît alors pour et comme transfert en soi. Ce serait probablement, le résultat du fait qu’au moment de la naissance il y a ce besoin immédiat de l’oxygène de l’air, insatisfait pendant un instant, lorsque l’oxygène des hématies du flux sanguin maternel s’arrête. La charge d’anydride carbonique (CO2) serait ainsi corrélative du manque de charge d’oxigène (O2). La charge d’anhydride carbonique excite donc, comme expression du besoin ou manque d’oxygène et serait liée au vécu de « danger ». Mais cette charge qui excite serait précisément, celle qui animerait, à partir de la proposition de sur-vivre implicite dans ce premier vécu, du fait duquel il y aurait une « proposition » bio – axio – logico - psychanalytique - théorique nécessaire de survivre.

L’excitation deviendrait ainsi ce à quoi fait allusion son synonyme, « animation », à l’intérieur de ce qui est passé de soma à âme, suite au transfert interne primordial fondateur de la proposition du sujet-objet. Cette centralisation -ou centrage- qui produit le vécu serait de ce fait le producteur de l’âme : le centre d’animation ou de proposition. Non seulement du « contrôle » et de la connexion ou « communication », dans l’expression de Wiener, mais aussi du « manque de contrôle », dont les causes ne sont pas le feed-back ou rétroaction ou « l’embouteillage des voies », -l’expression est à Wiener et Rosenblueth-, mais des raisons bien plus complexes qui concernent ce transfert qui centre, décentre et figure l’âme qui « évalue » « l’inversion » que Freud voit dans les rêves et avant lui, Marx, Hegel, Shakespeare, Héraclite, Salomon et encore avant, Moïse, le sauvé et plus tard le sauveur. La culture insiste sur ce point, en forgeant son paradigme sur Jésus, sa naissance, son salut et son sauver en pro-clamant une attention par laquelle on appelle, on clame, on ré-clame, on prie, on supplie : rite, langue, parole.

Parce qu’il s’agit, précisément, de cette inversion biologique constitutive aussi bien de la variation des acides nucléiques génétiques que de l’âme. Car telle est la transformation qui se produit entre l’excitation somatique décentrée et l’incitation animique centrée, qui exprime à son tour un besoin ou proposition suivi de la satisfaction équivalente à ce même besoin ou proposition. C’est par inversion que la satisfaction deviendrait la réplique ou la figuration -non dupliquée par inversion-, de l’excitation somatique devenue incitation ou animation ou souffle ou proposition ou quantité de valeur psychique.
Du fait même de con-centrer et par inversion, l’ex-citation somatique émise deviendrait un dé-centrer répliquant animé ou duplex Sujet-Objet qui auto-estime ou vit la valeur de « danger » vital de ce manque ou besoin ou incitation reçue ou proposition à satisfaire. Cette satisfaction sera, une fois atteinte, la contre-paire inverse de « salut », du manque ou besoin ou « danger » ou incitation reçue ou proposition précédents.

Car ce sur quoi Wiener et Rosenblueth travaillent en neurophysiologie, correspond aux recherches faites par Freud un demi-siècle avant, dans la clinique de patients atteints d’aphasie et/ou de paraphasie, dans le but de produire sa critique des théories centralistes de Broca et Wernicke. Freud abandonna leurs théories lorsqu’il découvrit par sa pratique médicale qu’entre l’afférence et l’efférence cérébrales se trouvait tout un « appareil du langage » -qu’il appela plus tard dans sa théorie psychologique, « appareil animique » (seelischer Apparat)- qui n’aurait pas la seule fonction de centrer. Sa fonction animique d’ « attention » serait celle du Csmenseur défenseur de l’auto-estime du Sujet-Objet de la proposition de vivre. Elle modifie ce qui se passe à l’intérieur d’un individu, car c’est l’estime ou le souffle (formes de la valeur) ou la « proposition » qui font que l’ « attention » ne soit pas seulement « centrée », mais aussi « dé-centrée », « transférée » et « inversée », pour « figurer » ce qui n’y est pas ou pour donner une autre forme, par « réplique », à ce qui s’y trouve.

C’est le transfert de et entre « formes » du langage et « valeurs » du vécu qui modifie ce qui se passe à l’intérieur d’un individu émetteur-récepteur ou entre deux individus ou plus. De là, l’incidence de la valeur de l’« attention » proprement dite. Plus tard, quand Freud aborda l’étude de ce patient atteint de paraphasie, alors transformé en analysant, il qualifiera l’attention de l’analyste comme flottante, pour souligner que la valeur de celle-ci ne devrait pas avoir d’incidence, rester figée ou plonger, pour se précipiter sur un aspect momentané du discours.

Autrement dit : ce que Wiener qualifie comme « non linéaire » correspond à ce que Freud avait déjà découvert en neuropathologie dans son cheminement vers la psychanalyse et sa conception du processus primaire, où inverser (feed-back) n’est pas séparé de centrer, décentrer et figurer, parce qu’il y a une relation de relativité complexe entre eux. D’autre part, «  figurer » chez Freud, c’est aussi « imaginer », « représenter », « mettre en scène » ou « répliquer », dans la mesure où toute production humaine suppose « figurer » l’ « information » au moyen de « répliques » qui modifient la forme et /ou la valeur (et / ou l’estime et/ou l’auto-estime).

La complexité est le résultat de la réplique dialectique de la vie somatique (manque de O2, résidu de CO2) comme valeur ex-citation, qui se transforme en valeur in-citation et devient valeur animation comme résultat de sa transformation en paire inverse équivalente : passage de forme besoin à forme satisfaction. Ces deux formes ou figures de la même valeur définissent la vie proprement dite comme ce qui crée une figure complète ou incomplète (Wittgenstein) de la forme de la valeur (Marx). On pourrait dire alors que l’homme « propose » ou figure l’accompli et « Dieu »  dispose pourvoir l’incomplet. C’est pourquoi, les idéologies et/ou les croyances religieuses et/ou philosophiques promettent ce qui manque. La valeur du souffle est pourvue par le désir à partir de la différence entre les deux premiers vécus de satisfaction: le salut respiratoire et la plénitude nutritionnelle digestive.

On trouve dans la relation excitation-satisfaction le même feed-back que Goethe (17), (18) et Feuerbach (05) appliquaient déjà à leurs métaphores organiques : « inspiration – expiration » et « systole – diastole », pour faire allusion à la « formule éternelle de la vie » ou à la dialectique de la vie animique.

Ce n’est pas le gouvernail, le timonier ou cyber de Wiener, mais la dialectique millénaire que lui et Rosenblueth ont trouvé dans le feed-back physiologique et dans les affinités biomoléculaires des acides nucléiques. C’est la dialectique qui leur a permis d’apprécier la complexité du travail d’attention du centre Csmenseur catalyseur de l’appareil animique de Freud. Parler actuellement d’un système d’attention situé dans le cerveau ou dans le système nerveux rend hommage à Freud. Mais après Wiener et Rosenblueth, le problème à élucider serait celui de la dialectique en tant que centre de l’appareil animique et centre à son tour d’un individu dont le soma sensori-moteur non érogène s’autorégulerait indépendamment de la présence ou non de celui-ci.

On pourrait dire que, s’il y avait un centre ou un système, il serait en lien avec la complexité ou la « relativité » vitale qui existe entre centrer, décentrer, figurer, inverser, identifier, copier et transférer au moyen de forme-valeur ; c’est-à-dire, entre importer et exporter des importances par « auto-estime » (du sujet-objet Csmenseur), en concordance avec la figure-cible du désir inconscient et au moyen de l’auto-attention préconsciente (du sujet Csmenseur) en vue de satisfaire des besoins et d’éviter des dangers.

Ce serait un travail complexe entre codes (ou « co-dires ») ou paires de langages : entre le code de la dyade inconscient-préconscient, que nous appelons « double » car elle se trouve à l’intérieur de tout un chacun et le code de la dyade préconscient-conscient, que nous appelons « diplo » parce qu’elle est en rapport avec l’autre et doit faire preuve de « diplo-matie ». C’est un travail des représentations animiques et de leurs représentants dans le domaine du langage social, parce que tous deux -les représentants et leurs représentations-, sont toujours pour et/ou contre la représentation-cible du désir, pour et/ou contre le Csmenseur. C’est un dialogue de la paire « désir-défense », laquelle, par inversion, figure aussi bien le complet que l’incomplet de la représentation-cible que le désir souhaite voir accomplie. C’est le dialogue intérieur, intime et le dialogue extérieur, social, du sujet-objet avec ses pairs reclamâtor-ingannâtor ou reclamâtrix-ingannâtrix en rapport avec leur dialectique forme-valeur et leur dialectique identification-transfert.

Il s’agirait de la même lutte effacée, qui ne devient distincte que dans le domaine social des classes, groupes et secteurs, lorsqu’elle centre des intérêts particuliers et circonstanciels, face au décentrage du changement vital que ce même ensemble de classes-groupes-secteurs s’efforce de centrer dans un Etat de droit conservé inchangé et commun –ou non- à tous les partis.

On pourrait dire qu’aussi bien à l’intérieur de l’espace moléculaire que cellulaire, tissulaire, organique, somatique, animique, social, environnemental, il s’agit toujours de langage ou d’échange vital dans le but de « vivre en soi » ou de « figurer vivre ». Dans le domaine de l’âme, c’est un échange entre des représentations animiques ; dans la société entre leurs représentants, car il est clair que ce n’est pas la vie du soma, mais la vie de l’âme qui anime le sapiens, voire le réplique, pourvu qu’on puisse imaginer une résonance somatique du clamer, enregistrée dans le contexte qui fait du texte du premier vécu de satisfaction respiratoire, un désir clé.

Parce que les représentants formels du langage sont des formes liées à l’information qui fait que l’idéologique de la sémiosphère forme - déforme - uniforme - uniformise, en conformant une formation politico-religieuse. C’est la formation animique d’un centre organisationnel Csmenseur qui répond, recense, censure choisit et catalyse la vie. Un centre que Freud appelle « appareil du langage » afin de développer une théorie complexe, non linéaire, à la place des ces théories plutôt centro-mécanico-linéaires de Broca et Wernicke. Freud découvre que c’est la dialectique animique qui reprend ou copie la dialectique somatique du centrer et dé-centrer ou qu’elle s’identifie avec celle-ci.

Cette dialectique s’exprime en animant le social et l’économique présent dans l’activité de construire, déconstruire et re-construire. Il s’agit de cet aspect animique intime qui conforme l’inter-humaine parce qu’il reçoit sa forme à partir du soma et de l’intimité génétique de la double spirale de l’ADN qui engendre la vie en répliquant (décentrer et centrer). Le capital est produit, accumulé et échangé comme langage, en tant qu’expression symbolique de la logique humaine de besoins multiples liés au ré-ckamer (avec satisfaction) et d’un désir unique lié au clamer (sans satisfaction). La grammaire humaine serait alors une séquelle ou une réplique d’une logistique hominidé de survie, qui serait à son tour, la réplique de la perméabilité cellulaire des bactéries et protozoaires vivant en milieu anaérobie et matrice évolutive de l’inversion CO2-O2 et peut-être de toute inversion.

A partir de cette vie primordiale de la planète, faite de molécules protéiques, autorégulées, anaérobies, productrices d’oxygène qui est à l’origine de l’atmosphère, on arrive à cette inversion vitale que la science et la théorie permettraient de vérifier : le passage de production de O2 à production de CO2. Le même CO2 que chez l’animal sapiens-reclamâtrix-reclamâtor ex-cite d’abord le soma et in-cite ensuite l’âme qui continuera toujours à clamer et à ré-clamer. C’est au moyen de ce réclamer animique que le CO2 produira de plus en plus de capital et de plus en plus de soi-même (comme CO2), jusqu’à réchauffer l’atmosphère et engendrer un danger commun qui oblige actuellement, à « investir » en « clamer et ré-clamer sauver ». Dans une perspective linéaire, on pourrait dire que si la production de CO2 continue de ce pas, nous respirerons à nouveau du CO2 comme nos ancêtres monocellulaires fournisseurs de l’O2 qui constitua l’atmosphère qui rendit possible l’évolution vitale naturelle jusqu’aux reclamâtrix-reclamâtor que nous sommes devenus aujourd’hui.

De là que la synthèse de la dialectique industrialisme – environnementalisme ferait tourner la vie au moyen de l’information et de l’informatique en vue d’éviter le cercle cyclique de la production de guerre, qui fait à la survie du réclamer par un travail jamais fini de construction et de dé-construction. On perçoit, aujourd’hui plus que jamais, ce travail qui, comme information et langage renvoie au ré-clamer en tant que réplique du clamer primordial individuel spécifique en rapport avec la perméabilité cellulaire. C’est pourquoi il paraît si évident que l’information, héritière du ré-clamer social et du clamer glottique individuel produise de plus en plus de valeur et qu’elle occupe une place croissante dans cette bourse des valeurs qui semble traduire ce qu’aurait été cette première cellule ayant besoin d’une valeur déterminée d’oxygène pour vivre.

C’est pourquoi il faut lire Marx, dans l’optique de Menger, Freud, Einstein, Heisenberg Wiener et Prigogine pour arriver au concept économique de la fonction animique d’ « attention », en rapport avec l’identification d’importances, avec importer, répliquer, subjectiver, transférer et objectiver au moyen d’une catalyse censoriale sensori-motrice centrale du Censeur ou Csmenseur, défenseur de l’auto-estime du sujet-objet. Lacan décentre, précisément, son attention de l’assistance médicale en vue de la centrer sur Freud et son attention « flottante ». Il crée à partir de Saussure, Jakobson, Lévi-Strauss et autres une épistémologie qui, avec Freud, semble figurer à nouveau, c’est-à-dire refigurer un psychanalyste en transfert, co-catalyseur de formes et de valeurs qui, en tant que tel, permettrait, d’apprécier également le social.

Voici un exemple très simple: le 11/09/1973 du Chili a attiré l’attention de l’Amérique Latine. Le 11/09/2001 américain a attiré l’attention mondiale. La forme et la valeur du deuxième « onze neuf » ont fait qu’il soit beaucoup plus informé que le premier et en conséquence, qu’il ait formé davantage, en dé-centrant et en attirant une attention précédemment centrée sur des événements moins informés : c’est la valeur animique d’attention. Et il ne s’agit pas de l’économie en général, mais de l’économie animique de la proposition d’attirer l’attention pour vivre. Car ce que le génome informe au soma et que celui-ci réplique sur l’appareil du langage animique, c’est ce qui doit surtout primer à partir de la naissance aérienne : la paire « appeler – répondre ».

Dans le domaine du social, attirer l’attention a pour but de dé-centrer l’attention d’autres centres qui la con-centrent. Ce n’est pas le travail collectif de la fourmi qui agit, mais le travail individuel du sapiens qui appelle. La destruction de « La Moneda » à Santiago du Chili, en 1973 a été un centre qui a attiré l’attention, mais la destruction du World Trade Center à New York en 2001, a été un centre qui a attiré davantage l’attention, en la dé-centrant quand elle était encore centrée sur le « onze neuf » chilien, et en l’at-tirant pour la centrer sur les EEUU. Revenons maintenant à l’Uruguay et à un autre « onze neuf », celui de 2006. Ce jour-là, l’attention en Uruguay, n’était pas tellement centrée sur les événements de 2001 à New York ni sur ceux de 1973 à Santiago du Chili, parce que ce jour-là, le centre d’attention des Uruguayens s’est déplacé ou s’est dé-centrée vers un autre centre, analogue par sa forme, mais d’une valeur plus élevée de promptitude ou de proximité : ce jour-là la Justice a décidé la première incarcération des militaires criminels.

L’attention se concentre et se décentre suivant les circonstances et ce n’est pas fortuit. C’est peut-être parce qu’à l’origine, l’attention est liée au contraste qui existe entre les deux premiers vécus de satisfaction, qui sont précisément, tous deux, le résultat de centrer ce qui était décentré. Et l’attention d’une collectivité est aussi un processus car elle est appelée à se concentrer. Il s’agirait d’une fonction animique plastique qui peut être aussi bien attirée qu’évitée parce qu’elle recense et elle censure et en conséquence, elle engendre, à son tour, le besoin d’inverser et/ou de figurer des formes qui n’attirent pas l’attention.

C’est ce que Freud découvrit dans le langage gestuel et/ou verbal de la veille et dans le langage figuratif du sommeil. Les mots concentrent ou synthétisent des morphèmes décentrés d’autres mots, ainsi que les figures concentrent des traits décentrés d’autres figures. Il s’agit de composés ou de la synthèse d’éléments. Cette synthèse, comme celle de la chimie, opère aussi bien dans le domaine animique que dans celui du langage ou du social à analyser. En 1899, alors qu’il étudiait ce phénomène dans le discours de ses analysants, Freud l’appela la chimie des syllabes. En 1808-9, Goethe parlait d’affinités électives pour désigner ce qu’il analysait dans l’aspect animique de la relation interpersonnelle et en1819-20, il parle de la dialectique comme formule éternelle de la vie. Entre Goethe et Freud, Feuerbach pense que Dieu serait une sorte d’auto-conscience inconsciente du sapiens ; sa vie animique serait ce que Herbart désigne comme « réel » dans les phases « passive » et « active » de l’«attention » ; elle fonctionnerait comme une sorte de « systole-diastole » dialectique, dans le sens de Hegel. A partir de cette réflexion, on pourrait supposer que c’est ce qu’on peut lire dans la paire Verdichtung – Verschiebung de Freud comme « centrer-dé-centrer ».

La ligne idéologique produite par Goethe, Herbart, Hegel, Feuerbach, Marx et Freud au XIXe et au XXe siècles esquisse une tétrade psychique (souffle, attention, langage et centrer – décentrer) de forme et de valeur. Ce serait la contribution qu’on pourrait faire à une théorie cohérente du syndrome de la dépersonnalisation. Elle permettrait de réfléchir théoriquement sur un concept situé au-delà de l’idée de personne, de moi ou de sujet de l’inconscient. Il ne serait plus question d’articuler dramaturgie, masque et scène pour rapporter la psychanalyse au théâtre dans l’histoire des idées, mais de regarder la culture comme une œuvre du croire et le croire comme seulement et uniquement psychique. De cette façon aussi bien la « personne » que le « moi », que « le sujet de l’inconscient » ou le « soi-même » ne seraient que des croyances. C’est ce que nous apprend la sémiologie psychiatrique et psychologique, à partir du centrer – décentrer du processus primaire.

Les sentiments de « dépersonnalisation », « désincarnation », « désanimation » et « déréalisation », seraient des vécus qui exprimeraient une oscillation de la valeur dans la dialectique de la paire : « centrer – décentrer ». Nous faisons allusion ici à cette plasticité qui se manifesterait par le glissement synonymique existant entre « valeur » et « souffle ». La rétraction du souffle amené à se concentrer sur un point peut être exprimé par l’attention en tant que telle. En centrant l’attention sur soi, elle se rétracte du soma érogène, tel qu’on peut l’apprécier dans la clinique psychiatrique du du syndrome (sémiologique) de Cotard ou elle peut se recentrer, mais de façon inharmonique, en bouleversant le schéma corporel comme dans le syndrome de dépersonnalisation. C’est peut être l’inverse qui se produit dans la « désanimation » des syndromes dépressifs névrotiques où les malaises somatiques ou « équivalents dépressifs somatiques » exprimeraient un dé-centrer du souffle qui se concentrerait ainsi, sur certaines zones « hyperérogénisées » à partir d’autre zones ainsi « hipoérogénisées ».

Au cours de l’adolescence on peut ressentir un certain détachement du corps à soi. Ce vécu engendre une question formulée habituellement comme : « et ce corps ici avec moi, qu’est-ce que c’est, qu’est-ce qu’il fait ? »
La question semble émerger d’un centre très réduit qui condenserait sur soi tout ce qui concerne l’animique. Ce centre, en tant que concentrateur du souffle comme valeur à un moment donné, n’est, peut-être, qu’un centre circonstanciel, puisque le référent de la valeur en soi serait le premier vécu de besoin comme forme, en raison de son antagonisme avec le premier vécu de satisfaction équivalent, qui devient alors forme de valeur.

Certains aspects de cette question pourraient être également appréciés dans le phénomène du déplacement de la main-d’œuvre par rapport au déplacement du capital, dont l’origine se trouve dans l’accumulation de cette même main-d’œuvre réalisée. On dit aussi : nul ne prophète en son pays, parce qu’on ne lui accorde pas la valeur qu’il obtient ailleurs. Il y aurait ainsi un centrer-décentrer dans la valeur attribuée au travail de la part de celui qui l’a dépouillé de valeur. On décentre la valeur de l’autre ou d’un travail de l’autre à cause du besoin économique de marquer une différence. Le désir salut-plénitude, matricé sur la différence qui existe entre le salut respiratoire et la plénitude digestive-nutritionnelle orienterait l’attention vers l’identification de valeurs ou d’importances, au sens de ce qui importerait importer et/ou exporter pour réussir à dé-con-centrer l’attention et l’orienter vers l’analyse de la dialectique présente dans la « forme-valeur » de l’autre, en vue d’identifier des importances et de décentrer-déplacer l’attention, à partir de là dans le but de l’orienter à se concentrer sur la dialectique « forme-valeur » propre. C’est une attention préconsciente qui ne distingue pas entre ce qui est à soi et ce qui n’est pas à soi, car ce serait le « décentrer–centrer » qui, -à partir du Csmenseur et comme paire dialectique-, catalyserait l’animation vers une homéostasie qui n’est vitale que dans l’animique.

Ce feed-back « centrer-décentrer » serait une plasticité « dé-fin-ie » par sa finalité de survie animique. Ce même feed-back engendrerait un « garder pour soi » (auto-garder) l’auto-animation à partir de la minus-value propre, au moyen de la « plus-value » étrangère. Le Hilflosigkeit ou « état de désaide » de la naissance serait plutôt une minus-value propre, puisque le nouveau-né compte avec la valeur de son clamer et de son é-mouvoir qui lui permettraient d’appeler, d’attirer ou de tirer une plus-value « d’attention » étrangère inversement et biologiquement proportionnelle et encore lointaine comme la louve. C’est une question de circonstances d’« amour » ou de celles qui, comme résultat du manque d’amour ou de son équivalent, pourraient fonder  -j’insiste sur ce point-, avec Romulus et Remus l’anagramme d’une telle clé d’amour.

La « Transformology » serait donc une transdiscipline en évolution vers une discipline dont l’objet serait l’étude de la transformation de l’information à l’intérieur de tout transfert discursif, sans privilégier une forme, quelle qu’elle soit : mercantile, psychosexuelle, linguistique, cybernétique, sémiotique. Et ce parce que la « Transformology » s’occuperait d’étudier le « centrer-décentrer-figurer-inverser » de la variation formelle de la valeur dans le devenir ou l’advenir imprévu de la dialectique « élement-composé », « partie-tout », ou « local-global ».

 

Traduction Martha AVELLA

00 AVELLA, M. (2007): Traducción y Comunicaciones personales, Montevideo, 2007. /Traduction et communications personnelles, Montevideo, 2007.
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